La dette du conseil général de Charente Maritime

Publié le par eelv-saintes-ouest

 

La dette est un moyen financier mais aussi un outil politique et politicien. Il convient donc de bien décoder son mécanisme, ses effets et les discours idéologiques qui accompagnent son évocation. L'objectif est d'éventuellement en faire un thème de campagne à contre courant des autres partis politiques traditionnels.

 

Pour le conseil général, la dette sert à boucler le budget. Lors de sa construction la discussion des dépenses survient en amont de la question du financement. Ce n'est que lorsque le volet dépense est acté que se pose la question du financement. Les recettes fiscales indirectes et les dotations de l'état sont simplement constatées. Il reste alors comme seules possibilités pour boucler le budget d'augmenter la fiscalité directe ou d'avoir recours à un emprunt. Le recours à l'emprunt a été systématiquent favorisé sur l'augmentation de la fiscalité pour des raisons essentiellement idéologiques (Je vous recommande de lire un article de Jean Gadrey dans alternatives économiques: http://alternatives-economiques.fr/blogs/gadrey/2010/11/24/sur-les-dettes-publiques-en-france-et-en-europe ).

 

La nature des emprunts a par ailleurs considérablement évolué depuis quelques années avec l'apparition des emprunts structurés: Pour faire vite, ceux-ci sont caractérisés par un taux initial bonifié (très bas voire parfois nul) puis indexé sur une valeur exotique comme le taux directeur de la banque de Suède ou le taux de change d'une monnaie. Ces emprunts sont très dangeureux et risquent de faire exploser les frais financiers dans les années qui viennent. Ils ont actuellement comme conséquences pour certaines collectivités territoriales de diminuer les frais financiers liés à la dette alors que l'endettement a explosé. Cette constatation dans un budget doit faire suspecter la présence d'emprunts toxiques. Par exemple la ville de Royan a reconnu avoir des dettes toxiques avec un taux indexé sur le taux de change du franc suisse (http://www.sudouest.fr/2011/02/16/l-endettement-de-la-ville-depend-du-franc-suisse-319685-1510.php)

 

La dette grimpe particulièrement depuis 5 ans dans toutes les collectivités territoriales, la charente maritime n'est pas une exception. Cependant l'accélération de l'endettement y est singulière. Pour analyser la structure de la dette, les cabinets de conseils financiers proposent une multitudes d'indicateurs. Le rationnel de ces indicateurs n'existent souvent pas et la valeur relative des différents indicateurs n'est pas consensuelle. Les cabinets d'audit et de conseil financier sont adossés au système financier qui vit de la dette: on peut légitimement s'interroger sur la pertinence de leurs préconisations. Un de leurs indicateurs récurrents est que l'endettement d'une collectivité doit être inférieure à 10 fois l'épargne brute de la collectivité. Par exemple en 2010 l'épargne brute de la Charente Maritime est de 53 millions d'euros alors que la dette est d'environ 400 millions d'euros. Le ratio de 1/10 sera vite atteint si l'on songe que la dette était de 215 millions en 2006. Voici quelques chiffres sur la dette qui laissent songeurs:

 

-Emprunt 2006: 46 millions d'euros

-Emprunt 2010: 116 millions d'euros soit une augmentation de150%

-Dette cumulée en 2006: 215 millions d'euros

-Dette cumulée en 2010: 400 millions

-Capacité d'autofinancement 2006:  115 millions d'euros

-Capacité d'autofinancement 2010: 52 millions d'euros

 

La droite bonne gestionnaire?

 

Mais le plus important est à mon avis que la dette est le moteur principal de l'économie productiviste et de l'économie financiarisée. Dire que ce sont les générations futures qui paieront nos dépenses est faux: c'est déjà une réalité: nous empruntons en grande partie pour payer la charge de la dette passée ce qui permet d'alimenter le système en boucle. Plus important si nous parlons des générations futures, il faut considérer que ce sont les enfants des débiteurs qui devront rembourser aux enfants des créanciers. La dette est un facteur d'aggravation des inégalités par ce biais là et surtout par les politiques menées qui sont imposées grâce à la peur de cette dette.

En effet ceux-là mêmes qui creusent les déficits des différents comptes publiques, font leurs campagnes sur la peur de ces déficits: La dette c'est mal. Pour y remédier il est fait appel à la notion de bonne dette et de mauvaise dette: La bonne dette c'est celle qui permet l'investissement et la mauvaise dette c'est celle qui sert « seulement » à financer les frais de fonctionnement. Sur les prochains exercices budgétaires du département les frais d'investissements seront engloutis par le transfert de l'aéroport, le contournent est de Rochefort et autres infrastructures routières contestables. Une partie importante du budget d'investissement est une aide directe ou indirecte au secteur privé. Le budget de fonctionnement du département c'est les transports scolaires, les aides sociales, les collège, etc: en fait c'est le service public: réduire le budget de fonctionnement c'est détruire progressivement le service public.

 

L'emprunt peut être nécessaire pour boucler un budget ponctuellement mais la raison commande d'éviter au maximum d'y avoir recours en favorisant une fiscalité juste (contrairement au parti socialiste qui n'a pas de position tranchée sur le concept de la dette en général). Il n'y a pas de bonne et de mauvaise dette: il n'y a que de bonnes et mauvaises dépenses dans un budget et, contrairement à l'idéologie libérale, les dépenses d'investissement ne sont pas vertueuses par nature tandis que les dépenses de fonctionnement seraient à réduire au minimum.

Reste que la majorité départementale va léguer un sacré fardeau à son successeur.

 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article